15/07  29/08/23
Exposition estivale
« Voyages en Noir & Blanc »

Bigaignon

Harold Feinstein, Crowded Beach, 1960, Courtesy Bigaignon
Harold Feinstein, Crowded Beach, 1960, Courtesy Bigaignon

Pas de trêve estivale pour la galerie Bigaignon, qui laisse ses portes ouvertes tout l’été avec une exposition centrée autour du voyage. L’exposition « Voyages en Noir & Blanc » présente du 15 juillet au 29 août 2023, les travaux de six artistes représentés ou soutenus par la galerie dans un accrochage estival inédit, éloge de la curiosité d’horizons pluriels. Une exposition assortie d’une sélection de beaux livres autour du voyage et d’un concert acoustique de l’artiste Epsilon en guise definissage.

La représentation du voyage est l’objet d’un intérêt artistique de longue date. Interrogeant la relation à l’espace physique tout comme à celui mental et géographique, le regard sur l’ailleurs se fait tour à tour occasion d’évasion, projection de soi-même, étude savante, ou preuve de curiosité. En photographie, cet intérêt s’est longtemps démarqué par une obligation du medium au noir et blanc à l’argentique, qui a su réinventer l’imaginaire coloré de la peinture orientaliste. Mais s’il n’est plus aujourd'hui une obligation, il reste un choix réfléchi. Le photographe américain Ralph Gibson porte ainsi son regard sur le large par des compositions graphiquement recherchées, ode à la liberté des voyageurs. Et ces voyageurs se reconnaîtront dans le travail de l’artiste italien Renato D’Agostin, précédemment qualifié « d’explorateur-né » par Thierry Bigaignon. Toute son œuvre incarne en effet le mouvement vers le lointain, passant par la voiture, l’avion, le vélo ou la marche à pied. La qualité de ses tirages par ailleurs, du petit au très grand format, sublime son regard avec une folle élégance. Dans sa série Anamnésis, le photographe Thierry Urbain invite pour sa part à réaliser sa propre expérience de l’égarement. Il présente des vues d’étendues méditerranéennes désertées de vadrouille humaine, évocations d’oasis intouchées.

Alors que le voyage en Italie a longtemps été obligatoire dans l’apprentissage artistique, les paysages de la péninsule sont restés muses. L’artiste italienne Vittoria Gerardi invite ainsi au voyage explorateur, l’ailleurs suggéré par la nature luxuriante vésuvienne, quand ce n’est pas par l’étendue de la vallée de la mort américaine. L’expédition outre-atlantique est en effet elle aussi source d’inspiration intarissable. Selon l’écrivain du Massachusetts Jack Kerouac, « the road is life ». C’est en dialogue constant avec sa pensée que l’artiste français Rémi Noël met en scène ses photographies, entre réel et imaginaire, sur les routes américaines. Enfin, les œuvres sélectionnées du photographe new-yorkais Harold Feinstein, dont le Centre de la Photographie à Mougins consacre une grande rétrospective jusqu’au 8 octobre 2023, dressent quant à elles le portrait intime d’une toute autre face de l’Amérique. C’est New York en été qui est capturé, destination rêvée par beaucoup, cadre estival quotidien pour d’autres, le temps d’explorations de proximité. Alors que les photographies ont pu un temps être critiquées comme désenchantant la spontanéité du voyage, la diversité de ces œuvres témoigne de la place pourtant toujours prépondérante de la quête de liberté qu’elles continuent à incarner. Pour les spectateurs, le voyage dépasse le déplacement dans l’espace : il sait naître de l’expérience de l'œuvre.