Du 19 avril au 13 juillet 2024, la Galerie XII présente une exposition de l’artiste danoise Susanne Wellm, proposée par Chantal et Gabriel Bauret. Intitulée « De l'autre côté », cette exposition explore des récits urbains et quotidiens. À partir d'une vaste collection d'images trouvées dans des albums photos, livres historiques, images de films ou dans ses propres clichés, Susanne Wellm établit des liens entre les drames personnels de la vie quotidienne et l'histoire des traumatismes collectifs de l'Europe moderne. Les images sont découpées, dissoutes avant d'être symboliquement retissées et renouées.
« L’histoire de la photographie, depuis son invention, est celle d’une conquête pour gagner en détails, maîtriser la restitution des lumières et des couleurs, jusqu’à donner une représentation toujours plus réaliste du monde. Et comme dans un mouvement de balancier, des artistes se sont à l’inverse employés à retrouver une approche sommaire de notre environnement pour mieux faire appel à l’imagination et tutoyer la fiction. Susanne Wellm a inventé une machine à jouer avec le flou, à donner l’illusion d’un mouvement, à introduire une part de mystère. Pour ce faire, elle a puisé dans une réserve de clichés de toutes provenances et dont les auteurs sont souvent anonymes ; cette réserve, qui lui a parfois permis de superposer des images différentes, offre un matériau à partir duquel elle a opéré de subtiles manipulations : une opération que l’on peut assimiler à celle d’un tissage qui fait s’entremêler, à l’instar d’un contrepoint musical, de longues bandes de tirages avec des fils se répartissant très régulièrement et méthodiquement à la surface de l’œuvre, ou s’interrompant parfois au milieu des photographies. Ce tissage forme ainsi une trame et filtre la vision. Le geste artistique se concentre sur cet entremêlement, la main guidant le métier à tisser ; il se loge dans le travail de la matière même de l’œuvre qui sera offerte à notre regard. Le sujet de l’image est relégué au second plan comme si l’attitude de l’artiste voulait témoigner d’une forme d’humilité à son égard. Un rideau est tombé entre le spectateur et la scène, mais l’on entrevoit que derrière lui un monde vit et bouge, la transparence du tissu, comme parfois au théâtre, laissant deviner des présences : nous percevons la réalité par bribes. Et la légende que l’artiste donne ici à chacune des œuvres nous entraîne sur la voie d’un récit dans lequel se profile l’idée d’un voyage, la traversée d’un paysage urbain, l’exploration d’intérieurs inconnus. »
Chantal et Gabriel Bauret